Jankee

Nous sommes en 2016. Yamel Thompson, une femme mexicaine de 23 ans, étudie le cinéma à l’école EICTV de Cuba. En flânant sur la jetée, elle croise le regard de Jans, un jeune pêcheur de 18 ans. « J’aimais la manière dont il me regardait », confie-t-elle au début de son film. Ce regard deviendra, des années plus tard, le véritable sujet de ce documentaire – bien au-delà du pays, de la mer, de la pêche, de l’amour, ou même de Jans lui-même. Car en 2016, Yamel – comme le reste du monde – ne pouvait imaginer que la vague #MeToo viendrait bouleverser le cinéma, ni que les notions de consentement, d’objectivation ou de gaze allaient transformer nos représentations comme nos amours.

Depuis leur premier échange de regards, Yamel filme Jans. Elle ne lui a jamais demandé sa permission ; c’était entre eux un jeu. La caméra lui donne de l’emprise, lui permet d’entrer dans l’intimité de son foyer, de le filmer sous la douche, sur le lit, quand il boude aussi. Elle devient également pour le duo un canal détourné pour se parler, autrement.

Aujourd’hui, Yamel n’a plus 23 ans. Elle revient sur ses débuts de cinéaste avec une lucidité désarmante : « Tant que je tenais la caméra, Jans était un personnage. »

Anne Delseth

Jankee, 2025
The Wait, 2016
Florence, 2015